La loi sur la Sécurité publique vient d'être votée : les communes, les entreprises et les particuliers sont également concernés par les nouvelles dispositions qu'elle prévoit

La loi sur la Sécurité publique vient d'être votée : les communes, les entreprises et les particuliers sont également concernés par les nouvelles dispositions qu'elle prévoit

La loi n°2017-258 relative à la Sécurité publique, votée le 1er mars 2017, a été publiée au JO ce 1er mars 2017.

Le projet de loi, présenté par le Gouvernement dans un contexte tendu, visait à "renforcer l'efficacité de la mobilisation des forces de l'ordre pour la sécurité, [pour lesquelles] il apparaît nécessaire de prévoir des dispositions leur permettant d'être juridiquement plus assurées lorsqu'elles ont à faire usage de leurs armes".

Selon l'objectif de la loi, il était aussi précisé : "Il est également apparu nécessaire de les protéger, à l'occasion des procédures pénales, contre ceux qui souhaiteraient se venger de l'autorité publique en s'en prenant aux personnes physiques qui l'incarnent. Enfin, plusieurs mesures renforcent les moyens d'action de ceux qui œuvrent quotidiennement à la sécurité de tous".

Tous concernés ? En effet.

Rappelons que ce texte comprend plusieurs chapitres.

Le chapitre Ier (art 1er) donne un cadre commun d'usage des armes aux policiers et gendarmes, ainsi qu'aux douaniers et militaires déployés sur le territoire national dans le cadre de réquisitions (opération Sentinelle) ou protégeant des installations militaires.

C’est ainsi que le nouvel article L.435-1 du Code de la Sécurité Intérieure (CSI) dispose désormais que :
« Dans l'exercice de leurs fonctions et revêtus de leur uniforme ou des insignes extérieurs et apparents de leur qualité, les agents de la police nationale et les militaires de la gendarmerie nationale peuvent, outre les cas mentionnés à l'article L. 211-9, faire usage de leurs armes en cas d'absolue nécessité et de manière strictement proportionnée :
« 1° Lorsque des atteintes à la vie ou à l'intégrité physique sont portées contre eux ou contre autrui ou lorsque des personnes armées menacent leur vie ou leur intégrité physique ou celles d'autrui ;
« 2° Lorsque, après deux sommations faites à haute voix, ils ne peuvent défendre autrement les lieux qu'ils occupent ou les personnes qui leur sont confiées ;
« 3° Lorsque, immédiatement après deux sommations adressées à haute voix, ils ne peuvent contraindre à s'arrêter, autrement que par l'usage des armes, des personnes qui cherchent à échapper à leur garde ou à leurs investigations et qui sont susceptibles de perpétrer, dans leur fuite, des atteintes à leur vie ou à leur intégrité physique ou à celles d'autrui ;
« 4° Lorsqu'ils ne peuvent immobiliser, autrement que par l'usage des armes, des véhicules, embarcations ou autres moyens de transport, dont les conducteurs n'obtempèrent pas à l'ordre d'arrêt et dont les occupants sont susceptibles de perpétrer, dans leur fuite, des atteintes à leur vie ou à leur intégrité physique ou à celles d'autrui ;
« 5° Dans le but exclusif d'empêcher la réitération, dans un temps rapproché, d'un ou de plusieurs meurtres ou tentatives de meurtre venant d'être commis, lorsqu'ils ont des raisons réelles et objectives d'estimer que cette réitération est probable au regard des informations dont ils disposent au moment où ils font usage de leurs armes ».

On précisera aussi que, selon les nouvelles dispositions de l’article L. 511-5-1, « Les agents de police municipale autorisés à porter une arme selon les modalités définies à l'article L. 511-5 peuvent faire usage de leurs armes dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article L. 435-1 et dans les cas prévus au 1° du même article L. 435-1 ».

Le chapitre II (art 2) tend au renforcement de la mutualisation des polices municipales en portant le seuil précédemment fixé de 20.000 à 80.000 habitants à l’article L.512-2 du CSI lequel dispose désormais que : « Les communes formant un ensemble de moins de 80 000 habitants d'un seul tenant peuvent avoir un ou plusieurs agents de police municipale en commun, compétents sur le territoire de chacune d'entre elles. Pendant l'exercice de leurs fonctions sur le territoire d'une commune, ces agents sont placés sous l'autorité du maire de cette commune ».

Le chapitre III (art 3 et 4) concerne la protection de l'identité des policiers, des gendarmes, des agents des douanes ainsi que des signataires de décisions administratives fondées sur des motifs en lien avec le terrorisme. Il permet ainsi notamment, à tout agent de la police nationale et de la gendarmerie nationale, de s'identifier, dans certains actes de procédure qu'il établit, par un numéro d'immatriculation administrative.

Les chapitres suivants contiennent des dispositions diverses, dont :
- des précisions indispensables à la bonne mise en œuvre du dispositif relatif aux enquêtes administratives concernant les affectations et recrutements dans les entreprises de transport public de personnes et dans les entreprises de transport de marchandises dangereuses ;
- le renforcement de la mesure de contrôle administratif des retours ;
- l'aggravation des peines de l'outrage commis contre des personnes dépositaires de l'autorité publique.

A noter également que les personnes exerçant les activités de protection physique individuelle des personnes (autrement appelés « bodyguard ») sont désormais autorisés à être armés, comme le sont les transporteurs de fonds par exemple ou certains agents de sécurité de sites sensibles, dans l’exercice de leur mission, mais sous la condition suivante : uniquement « lorsqu'ils assurent la protection d'une personne exposée à des risques exceptionnels d'atteinte à sa vie » (article L.613-12 du CSI).

Enfin, l’une des dispositions qui avaient concentré certaines critiques figure désormais dans la loi : elle concerne ce que l’on a appelé la consultation de sites djihadistes.

Ainsi, le code pénal est complété d’un article 421-2-5-2 qui dispose que : « Le fait de consulter habituellement et sans motif légitime un service de communication au public en ligne mettant à disposition des messages, images ou représentations soit provoquant directement à la commission d'actes de terrorisme, soit faisant l'apologie de ces actes lorsque, à cette fin, ce service comporte des images ou représentations montrant la commission de tels actes consistant en des atteintes volontaires à la vie est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende lorsque cette consultation s'accompagne d'une manifestation de l'adhésion à l'idéologie exprimée sur ce service. Constitue notamment un motif légitime tel que défini au premier alinéa la consultation résultant de l'exercice normal d'une profession ayant pour objet d'informer le public, intervenant dans le cadre de recherches scientifiques ou réalisée afin de servir de preuve en justice ou le fait que cette consultation s'accompagne d'un signalement des contenus de ce service aux autorités publiques compétentes ».

La constatation de ce type de faits au sein même d’une entreprise, servant à fonder une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement, dans l’hypothèse où un salarié viendrait à consulter ce type de sites Internet sur son lieu de travail, pourrait bien recevoir dans un avenir proche des illustrations particulières.

On voit bien que cette loi contient toute une série de dispositions qui ne concernent pas simplement les forces de l’Ordre.

A suivre : les décrets d’application dans les prochains mois.

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Arnaud de SAINT REMY
Avocat associé en charge du Pôle Droit pénal
adestremy@emo-hebert.com