L'abandon de poste, souvent perçu comme un acte irréfléchi pouvant mener à une rupture définitive du contrat de travail, soulève de nombreuses questions dans le domaine du droit du travail. Contrairement à une idée reçue, un tel acte ne conduit pas systématiquement à un licenciement pour faute grave. Dans quelle situation cette sanction n'est pas applicable ? Pour quelles raisons ? Le cabinet EMO AVOCATS vous propose un cas concret pour mieux comprendre.
Dans un arrêt rendu le 17 janvier 2024 (n°22-24.589), la Cour de cassation précise que l’abandon de poste d’un salarié ne justifie pas automatiquement son licenciement pour faute grave.
Quels étaient les faits de l’espèce ?
L’employeur permet à son salarié qui doit s’occuper de sa mère malade de solder ses congés payés (absence de près de 6 semaines au total).
Le salarié sollicite ensuite la rupture conventionnelle de son contrat de travail, ce que refuse l’employeur.
Le salarié ne se présente pas à son poste de travail à la date prévue.
Il ne donne pas suite aux lettres de mise en demeure de son employeur qui le licencie pour faute grave, compte tenu notamment du poste stratégique occupé par ce salarié et du contexte dans lequel intervenait cet abandon de poste, à savoir une période de forte activité. Le motif de faute grave semble légitime pour l'employeur, qui juge donc que les conséquences de l'absence du salarié à son poste impact la productivité de l'entreprise.
Position de la Cour de cassation
Pour la Cour de cassation, cela ne justifiait pas l'impossibilité du maintien du salarié dans l'entreprise, conformément à la définition de la faute grave.
En effet, le salarié avait effectivement abandonné son poste de travail et n'avait pas répondu aux mises en demeure de son employeur, mais avait une grande ancienneté, n'avait pas d'antécédent disciplinaire et n'avait pas réintégré son emploi parce qu'il s'occupait de sa mère "âgée, malade et isolée".
La Cour de cassation est donc sensible aux difficultés personnelles du salarié.
Il en résulte donc un important aléa : tout dépend du contexte et de l'appréciation souveraine des juges du fond.
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Emmanuelle DUGUE-CHAUVIN
Avocat associé spécialiste en droit social
En charge du Pôle social et du Pôle Santé-Sécurité au travail au sein du cabinet EMO AVOCATS
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Camille LAMBERT
Juriste
Pôle social du cabinet EMO AVOCATS
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