Le télétravail : incontournable mode d’aménagement du travail en cas d’inaptitude du salarié dans le cadre de son reclassement obligatoire ?

Le télétravail : incontournable mode d’aménagement du travail en cas d’inaptitude du salarié dans le cadre de son reclassement obligatoire ?

La Cour de cassation se prononce sur la question de savoir si l’employeur, pour satisfaire à son obligation de reclassement d’un salarié déclaré inapte, doit proposer un poste en télétravail préconisé par l’avis d’inaptitude, dans un arrêt rendu le 29 mars 2023. Explications.

• Les faits de l’espèce

Une salariée engagée initialement en qualité de secrétaire médicale, exerçant en dernier lieu les fonctions d’assistante coordinatrice d’équipe pluridisciplinaire, est déclarée inapte à son poste, à l'issue de deux examens médicaux rédigé par le médecin du travail.

L’avis d’inaptitude précise qu’elle pourrait occuper un poste administratif, sans déplacement, à temps partiel, en télétravail à son domicile avec aménagement de poste approprié.

Elle a finalement été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

• Position de la Cour de cassation

La Cour de cassation (Cass. soc., 29 mars 2023, n°21-15.472) rappelle qu’il appartient à l'employeur de proposer au salarié, loyalement, en tenant compte des préconisations et indications du médecin du travail, un autre emploi approprié à ses capacités, aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

La Cour de cassation juge ainsi que l’employeur a manqué à son obligation en refusant le reclassement au motif que l’entreprise n’avait pas mis en place le télétravail.

Les juges relèvent en effet que le médecin du travail avait été clair dans ses préconisations, que le poste du salarié était télétravaillable et que l’aménagement d’un poste en télétravail peut être individuel et résulter d’un avenant au contrat.

On rappellera qu'aux termes de l'article L. 1226-10 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail.

• Les enseignements à tirer de cette décision

Le reclassement se complexifie et il convient donc d’être vigilants aux préconisations du Médecin du travail.

Mais il convient surtout d’intégrer le télétravail dans l’organisation du travail en prenant conscience des risques liés à cette nouvelle forme de travail.

Selon une enquête réalisée auprès de 500 DRH en février, 84 % souhaitent une évolution du Code du travail sur le télétravail, afin de simplifier le suivi du temps de travail et clarifier la responsabilité de l’employeur en matière de santé et sécurité.

Les DRH militent pour une responsabilité partagée avec le salarié.  Actuellement, c’est l’employeur qui est responsable en termes de sécurité de l’environnement du travail et de respect du temps de travail.

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L’équipe du Pôle Social dirigé par Emmanuelle DUGUE-CHAUVIN se tient bien entendu à votre disposition pour répondre à vos questions et vous accompagner.

Emmanuelle DUGUE-CHAUVIN
Avocat associé spécialiste en droit social
En charge du Pôle social et du Pôle Santé-Sécurité au travail au sein du cabinet EMO AVOCATS
echauvin@emo-avocats.com

Camille LAMBERT
Juriste
Pôle social du cabinet EMO AVOCATS
clambert@emo-avocats.com

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION DU 29 MARS 2023