La Cour de cassation s'est prononcée sur le sujet de la loyauté du salarié en cas d'arrêt maladie, dans deux arrêts d'espèce rendus récemment. Il en ressort que, pendant un arrêt de travail de plus ou moins longue durée, le salarié pourrait participer à des compétitions de badminton, voire même travailler pour une société concurrente, sans que cela constitue en soi un manquement à l'obligation de loyauté vis-à-vis de l'employeur. Ces solutions inédites méritent quelques explications.
1°) Première affaire : l’arrêt du 1er février 2023
Quels étaient les faits de l’espèce ?
Un salarié de la RATP avait participé pendant les arrêts de travail prescrits entre novembre 2016 et novembre 2017, à 14 compétitions de badminton.
L’employeur avait révoqué les le salarié. Le salarié a saisi le Conseil de prud’hommes afin de contester sa sanction.
La cour d’appel donne raison au salarié en relevant que la participation aux tournois de badminton n’aurait pas aggravé son état de santé, ni prolongé ses arrêts de travail.
Elle en déduit que l’activité de badminton n’a pas causé de préjudice à l’employeur et que ces faits ne caractérisent pas un manquement à l’obligation de loyauté, qui subsiste pendant l’arrêt de travail.
La RATP forme un pourvoi en cassation, en faisant valoir que l’arrêt de travail provoqué par la maladie, a pour seul objet de permettre au salarié de recouvrer la santé et d’être en capacité de reprendre son poste de travail ; l’absence d’un salarié placé en arrêt de travail cause nécessairement un préjudice à l’employeur qui est tenu, pendant toute la durée de son absence, d’engager des frais pour maintenir la rémunération du salarié, pour réorganiser son activité et ou pour procéder au remplacement.
Quelle est la position de la Cour de cassation ?
L’exercice d’une activité pendant un arrêt de travail provoqué par la maladie ne constitue pas en lui-même un manquement à l’obligation de loyauté, qui subsiste pendant la durée de cet arrêt. Dans un tel cas, pour fonder un licenciement, l’acte commis par un salarié doit causer préjudice à l’employeur ou l’entreprise.
Ce préjudice ne saurait résulter du seul maintien intégral du salaire, en conséquence de l’arrêt de travail, assumé par l’employeur, qui assure lui-même le risque maladie de ses salariés.
2°) Deuxième affaire : l'arrêt du 7 décembre 2022
Quels étaient les faits de l’espèce ?
Une aide-soignante avait travaillé pendant son arrêt maladie pour un autre employeur en exerçant les mêmes fonctions.
Licenciée pour faute grave, la cour d’appel avait jugé le licenciement légitime.
Les juges avaient retenu qu’elle n’avait pas informé son employeur qu’elle percevait les indemnités journalières de la sécurité sociale, alors que celui-ci avait maintenu son salaire pendant les arrêts de travail ; les manquements étaient doubles à l’égard des organismes de sécurité sociale et de son employeur.
La salariée forme un pourvoi en cassation.
L’arrêt d’appel est cassé.
La position est la suivante :
Le préjudice ne peut résulter du seul paiement d’un complément d’indemnité pendant l’arrêt de travail.
L’obligation à laquelle est tenue l’employeur trouve sa cause dans le contrat de travail.
La seule possibilité pour l’employeur aurait été d’organiser une contre-visite médicale.
Sources :
Soc., 1er février 2023, 21-20.526
Soc., 07 décembre 2022, n° 21-19.132
https://www.lexbase.fr/jurisprudence/90594524-cass.-soc.-07-12-2022-n-21-19.132-f-d-cassation
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Emmanuelle DUGUE-CHAUVIN
Avocat associé spécialiste en droit social
En charge du Pôle social et du Pôle Santé-Sécurité au travail au sein du cabinet EMO AVOCATS
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Camille LAMBERT
Juriste
Pôle social du cabinet EMO AVOCATS
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