Lorsqu’un employeur propose à un salarié d’adhérer à un contrat de sécurisation professionnelle (CSP) dans le contexte d’un licenciement économique, il doit l’avoir informé par écrit du motif économique de la rupture avant son adhésion au CSP, l’adhésion étant matérialisée par la remise du bulletin d’acceptation par le salarié.
• Les faits
Dans l’arrêt commenté, une salariée contestait le bien-fondé de son licenciement après avoir adhéré à un CSP.
Dans cette espèce, la chronologie était la suivante :
29 octobre : tenue de l’entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement pour motif économique. Au cours de cet entretien, l’employeur lui avait proposé d’adhérer au contrat de sécurisation professionnelle (CSP). 6 novembre : la salariée retourne le bulletin d’adhésion au CSP. 9 novembre : l’employeur adresse un courrier à la salariée l’informant du motif économique de la rupture et en lui rappelant qu’en cas de refus d’adhésion au CSP ce courrier vaudrait notification de son licenciement pour motif économique. 18 novembre, le dossier complet d'adhésion du contrat de sécurisation professionnelle était envoyé au Pôle emploi.
Par la suite, la salariée a contesté le bien-fondé de son licenciement au motif qu’elle n’avait été informée du motif économique de la rupture de son contrat de travail qu’après son adhésion au CSP.
• Rappels sur le CSP
Pour rappel, le CSP est un dispositif d’accompagnement renforcé que les entreprises de moins de 1 000 salariés (ainsi que, quel que soit leur effectif, les entreprises en redressement ou en liquidation judiciaire) doivent proposer aux salariés susceptibles d'être licenciés pour motif économique. Le salarié dispose d’un délai de 21 jours pour accepter ou refuser d’y adhérer.
Si le salarié accepte, le contrat est rompu d’un commun accord. Cependant, l’employeur n’est pas dispensé d’indiquer au salarié le motif économique à l’origine de cette rupture.
Dans sa décision du 18 janvier 2023, la Cour de cassation que l'employeur est en conséquence tenu d'énoncer la cause économique de la rupture du contrat :
- Soit dans le document écrit d'information sur ce dispositif remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement,
- Soit dans la lettre qu'il est tenu d'adresser au salarié lorsque le délai de réponse expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement,
- Soit encore, lorsqu'il n'est pas possible à l'employeur d'envoyer cette lettre avant l'acceptation par le salarié du contrat de sécurisation professionnelle, dans tout autre document écrit, porté à sa connaissance au plus tard au moment de son acceptation. A défaut, la rupture est dépourvue de cause réelle et sérieuse.
L’information du motif économique doit donc être écrite.
L’employeur ne peut donc pas soutenir avoir informé oralement le salarié pendant l’entretien préalable au licenciement.
Faute d’information écrite, le licenciement est donc sans cause réelle et sérieuse.
• Etat de la jurisprudence antérieure
La jurisprudence est constante : l'écrit qui énonce la cause de la rupture doit être remis au salarié au cours de la procédure de licenciement et au plus tard au moment de l'acceptation du CSP.
Mais qu’est ce qui matérialise « l’acceptation du CSP » par le salarié ?
• Précision apportée par l’arrêt du 18 janvier 2023
Dans cet arrêt, l’employeur soutenait que l’adhésion du salarié au CSP n’avait été complète que le 18 novembre, soit au moment de l’envoi du dossier complet au Pôle emploi.
L’employeur considère donc avoir donné le motif économique avant l’adhésion au CSP, puisque l’écrit était daté du 9 novembre.
La Cour de cassation rejette cette analyse, et considère que la salariée avait adhéré au contrat de sécurisation dès le 6 novembre en adressant à son employeur le bulletin d'acceptation.
Peu importe ensuite la date d’envoi du dossier complet au Pôle emploi.
---> Le licenciement est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse, la salariée ayant adhéré au CSP sans que le motif économique ne lui ait été communiqué par écrit antérieurement.
Enfin, ayez à l’esprit, que le dispositif du CSP a été prolongé du 31 décembre 2022 au 31 mars 2023.
Cette prolongation de trois mois seulement au lieu d’un an habituellement doit permettre aux partenaires sociaux de tirer les conséquences de l’évolution des règles de l’assurance chômage.
Source
Cass. soc. 18 janvier 2023, n° 21-19349 FB
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Emmanuelle DUGUE-CHAUVIN
Avocat associé spécialiste en droit social
En charge du Pôle social et du Pôle Santé-Sécurité au travail au sein du cabinet EMO AVOCATS
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Clémence MOREAU
Avocat
Pôle social du cabinet EMO AVOCATS
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