L’employeur est tenu de s’assurer régulièrement que la charge de travail du salarié en forfait jours est raisonnable, ce suivi devant lui permettre de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec le respect des repos journaliers et hebdomadaires.
L’accord n’instituant pas un tel suivi est donc illicite et les conventions individuelles qui s’y réfèrent sont entachées de nullité.
C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 13 octobre 2021 (Cass. Soc., 13 octobre 2021, n°19-20.561).
• Quels étaient les faits de l’espèce ?
La Cour d’appel de Poitiers avait débouté le salarié de sa demande en considérant que :
- Le salarié répondait aux exigences de responsabilité et d’autonomie fixées par l’accord collectif ;
- La convention de forfait en jours signée prévoyait que la durée quotidienne de travail devait rester en moyenne inférieure à la durée maximale prévue pour les personnes dont le décompte du temps de travail s’effectuait en heures ;
- En cas de situation durable d’amplitude journalière forte de travail, un point serait fait avec la hiérarchie pour rechercher des moyens d’y remédier ;
- Le salarié bénéficiait, au-delà des deux jours de repos hebdomadaires consécutifs dont le dimanche, de cinquante-six jours de congés dans l’année, compte tenu d’un droit à congé payé complet.
• Position de la Cour de cassation
La Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel en constatant que l’accord collectif de la banque :
- Fixe un nombre fixe de jours travaillés dans l’année au regard d’un droit à congé payé complet ;
- Prévoit le contrôle des jours travaillés et des jours de repos dans le cadre d’un bilan annuel ;
- Prévoit un suivi hebdomadaire afin de vérifier le respect des règles légales et conventionnelles en matière de temps de travail, notamment les onze heures de repos quotidien ;
- Mais n’institue pas de suivi effectif et régulier permettant à l’employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable et ainsi n’est pas de nature à garantir « que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et à assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail de l’intéressé, ce dont il se déduisait que la convention de forfait en jours était nulle ».
Le simple fait que la convention individuelle institue un mécanisme d’alerte en cas d’amplitude de travail trop élevée ne suffit pas à assurer la validité de cette convention.
L’accord collectif doit lui-même prévoir un mécanisme permettant d’assurer l’effectivité des droits du salarié au respect d’une amplitude et d’une charge de travail raisonnables.
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Emmanuelle DUGUE-CHAUVIN
Avocat associé spécialiste en droit social
En charge du Pôle social et du Pôle Santé-Sécurité au travail au sein du cabinet EMO AVOCATS
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Juriste
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