Dans cet arrêt du 2 juin 2020 la Cour d’appel de Paris emploie pour la première fois la notion de « bore-out » pour caractériser l’existence d’une situation de harcèlement moral, conduisant à la nullité du licenciement.
• Qu’est- ce que le bore-out ?
Le bore-out est un trouble psychologique qui correspond à une situation d’épuisement professionnel trouvant sa source dans l’absence de tâches confiées à un salarié par son employeur et donc l’ennui, ainsi que la non-utilisation par l’employeur des compétences possédées par le salarié, engendrant une absence de satisfaction professionnelle, ce qui se traduit par des maladies physiques.
La notion de bore-out est donc l’inverse du burn-out, causé par un excès de travail, dont on entend beaucoup parler ces dernières années.
Elle doit nécessairement être mise en lien avec deux obligations fondamentales de l’employeur : son obligation de fournir du travail aux salariés et son obligation de sécurité.
• Quels étaient les faits de l’espèce ?
La Cour d’appel donne gain de cause au salarié en jugeant que l’ensemble des faits de cette affaire étaient de nature à laisser présumer une situation de harcèlement moral.
Les juges retiennent également que la dégradation de l’état de santé du salarié est liée à la dégradation de ses conditions de travail.
Selon la Cour d’appel, l’employeur n’a donc pas démontré que les agissements dénoncés par le salarié étaient étrangers à tout harcèlement moral, lequel est par conséquent établi.
Enfin, au visa de l’article L1152-3 du Code du travail, il est rappelé que « lorsque l’absence prolongée d’un salarié est la conséquence d’une altération de son état de santé consécutive au harcèlement moral dont il a été l’objet, l’employeur ne peut, pour le licencier, se prévaloir du fait qu’une telle absence perturbe le fonctionnement de l’entreprise. Le licenciement est dès lors nul ».
Les conséquences financières d’une telle décision sont lourdes : le salarié a obtenu 35 000 euros de dommages et intérêts, ainsi que 8 855 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et de l’indemnité de congés payés correspondant au préavis. Quant au préjudice spécifique au harcèlement moral, celui-ci a été indemnisé à hauteur de 5 000 euros.
Se pose désormais la question de savoir si la Cour de cassation suivra ou non cette conception et reconnaîtra également le bore-out comme constitutif de harcèlement moral.
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Emmanuelle DUGUE-CHAUVIN
Avocat associé spécialiste en droit social
En charge du Pôle social et du Pôle Santé-Sécurité au travail au sein du cabinet EMO AVOCATS
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Camille LAMBERT
Juriste en alternance
Pôle social du cabinet EMO AVOCATS
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