Coronavirus Covid-19 : Vient de paraître une nouvelle ordonnance qui modifie ou précise l’état d’urgence sanitaire et le droit applicable notamment aux délais et dates d’échéance

Coronavirus Covid-19 : Vient de paraître une nouvelle ordonnance qui modifie ou précise l’état d’urgence sanitaire et le droit applicable notamment aux délais et dates d’échéance

La loi instituant l’état d’urgence sanitaire du 23 mars 2020 a habilité le Gouvernement à prendre durant les trois mois à compter de sa publication, toute mesure pour faire face aux conséquences de la propagation du covid-19 et pour en limiter les effets.

Ainsi, le Gouvernement adopte au fil du temps une série de textes qui modifie ici ou là notre législation applicable à la vie quotidienne des français et des entreprises.

En fonction des besoins, de nouvelles ordonnances apparaissent et il s’agit d’être vigilants à la fois sur les règles nouvelles qui viennent à s’appliquer immédiatement et celles qui pourraient bien durablement modifier notre corpus juridique.

Notre cabinet est donc à l’affut de ces nouvelles publications et vous en fait une analyse aussitôt que possible.

Voici la dernière ordonnance publiée au Journal officiel de de jour (JORF n°0093 du 16 avril 2020).

Cette ordonnance n°2020-427 du 15 avril 2020 porte diverses dispositions en matière de délais pour faire face à l’épidémie de covid-19.

Elle apporte des aménagements et compléments aux dispositions prises sur ce fondement par l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période et par l’ordonnance no 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l’ordre administratif.

A titre liminaire, une précision est nécessaire quant aux conditions dans lesquelles le régime dérogatoire résultant de ces ordonnances s’achèvera.

L’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 a instauré un dispositif de report de divers délais et dates d’échéance.

Elle a ainsi défini pour cela, au I de l’article 1er, une « période juridiquement protégée » qui court à compter du 12 mars 2020 jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois après la fin de l’état d’urgence sanitaire.

A ce jour, compte tenu des dispositions de l’article 4 de la loi du 23 mars 2020, la durée de l’état d’urgence sanitaire est prévue pour s’achever le 24 mai 2020, de sorte que la « période juridiquement protégée » s’achèverait un mois plus tard, soit le 24 juin 2020.

L’ordonnance du 25 mars 2020 sur les délais, comme d’ailleurs d’autres ordonnances adoptant des mesures d’urgence pour faire face à l’épidémie, ont ainsi défini la fin du régime qu’elles ont instauré en fonction de la fin de l’état d’urgence sanitaire.

La date d’achèvement de ce régime dérogatoire n’est toutefois ainsi fixée qu’à titre provisoire.
En effet, elle méritera d’être réexaminée dans le cadre des mesures législatives de préparation et d’accompagnement de la fin du confinement.

Le Chef de l’Etat a annoncé dans son allocution du 13 avril 2020, que la fin du confinement devrait s’organiser à compter du 11 mai 2020.

Selon les modalités de sortie du confinement qui seront définies par le Gouvernement, celui devrait donc adapter la fin de la « période juridiquement protégée » pour accompagner, le cas échéant plus rapidement qu’il était initialement prévu, la reprise de l’activité économique et le retour aux règles de droit commun de computation des délais.

Le titre I er de l’ordonnance du 15 avril 2020 apporte ainsi des modifications aux dispositions générales relatives à la prorogation des délais.

L’article 1er complète la liste des délais, mesures et obligations exclus du champ d’application du titre I er de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020.

Il ajoute aux exclusions, aux 3° et nouveau 3° bis du II de l’article 1er, l’inscription aux procédures de délivrance des diplômes afin de pouvoir assurer le respect d’un certain nombre d’échéances ou de formalités conditionnant la recevabilité de cette inscription.

Il précise également ce que recouvre la notion de « voies d’accès à la fonction publique », à savoir, comme c’est traditionnellement le cas, les voies d’accès aux corps, cadres d’emplois, grades et emplois des agents publics.

Dans le domaine de la fonction publique, sont également exclues les procédures de mutations, détachements, mises à dispositions ou autres affectations des agents publics pour lesquelles les délais doivent être maintenus compte tenu de l’importance des mouvements d’agents publics qui interviennent dans les mois précédant la rentrée scolaire.

Les exemptions apportées aux 4° bis ont pour objet, s’agissant des mesures intéressant la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme, d’assurer la mise en œuvre sans délai par les entités assujetties des mesures de gel des avoirs destinées à lutter contre le financement du terrorisme et la prolifération décidés par la direction générale du Trésor, conformément aux obligations internationales et européennes (Conseil de sécurité de l’ONU, Union européenne, Groupe d’action financière - GAFI) et de permettre l’information du service à compétence nationale Tracfin nécessaire à ses activités de renseignement indispensables à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme mais aussi à la lutte contre la criminalité financière en général.

Les dérogations prévues par le 4° ter concernent les obligations de déclaration à l’Organisme pour le registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance (ORIAS) pesant sur les intermédiaires en assurance et réassurance ainsi qu’en opération de banque et services de paiement, sur leurs mandants, sur les entreprises d’assurance auprès desquelles ces intermédiaires ont souscrit un contrat au titre de leur responsabilité civile professionnelle et sur les établissements de crédits ou les sociétés de financement auprès desquels ils ont souscrit une garantie financière afin d’assurer une mise à jour des informations les concernant à destination tant des particuliers que des entreprises d’assurance et des établissements de crédit soucieux de s’assurer de la régularité de la distribution des produits et services proposés.

Les dérogations prévues au 4° quater sont justifiées par la nécessité d’assurer la continuité de la surveillance des marchés, des opérations réalisées par les émetteurs et les acteurs tels que les sociétés de gestion de portefeuille, dépositaires, conseillers en investissements financiers, sociétés civiles de placement immobilier, gestionnaires d’actifs, intermédiaires en opération de banque et services de paiement en période de crise, ainsi que la continuité des systèmes.

Ce 4° quater est en outre destiné à empêcher la suspension des obligations déclaratives imposées en application du I et II de l’article L. 233-7 du code de commerce.

Le 4° quinquies concerne les délais relatifs à la déclaration établie pour chaque transfert physique de capitaux en provenance ou à destination d’un Etat membre (obligation déclarative de capitaux auprès de l’administration des douanes).

Cette dérogation permet de maintenir la traçabilité des flux transfrontaliers d’argent liquide, qui participe à la lutte contre le blanchiment d’argent, le financement du terrorisme et la fraude fiscale, et les sanctions applicables en cas de manquements à cette obligation déclarative.

Les délais relatifs à la déclaration prévue à l’article 3 du règlement (CE) no 1889/2005 du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant ou sortant de la Communauté sont également exclus de l’application de cette ordonnance dès lors que la déclaration résulte d’une obligation prévue par le droit de l’Union européenne.

Le 6° exclut les délais concernant les déclarations relatives aux produits chimiques et installations y afférentes, prévues aux articles L. 2342-8 à L. 2342-21 du code de la défense.

Le 7° exclut les délais de demande de restitution de l’enfant recueilli à titre provisoire comme pupilles de l’Etat définis au deuxième alinéa de l’article L. 224-6 du code de l’action sociale et des familles.

Les demandes d’aides, déclarations et formalités nécessaires pour bénéficier des différents régimes d’aides relevant de la politique agricole commune, la fixation des dates limites relève en grande partie de la subsidiarité des Etats membres.

Toutefois, cette subsidiarité est dans un certain nombre de cas bornée par des dates butoir établies par le droit de l’Union européenne.

Le 8° vise à ce que les demandes d’aides ainsi que les déclarations et formalités nécessaires pour bénéficier des différents régimes d’aides relevant de la politique agricole commune ne relèvent pas de l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020.

Le 9° exclut, pour des motifs de protection des intérêts fondamentaux de la nation, de sécurité, de santé et de salubrité publiques et de protection de l’environnement, les délais auxquels sont soumis les opérateurs publics ou privés pour assurer la sécurité nucléaire et la protection des installations, équipements et transports nucléaires.

Ces délais encadrent des obligations de déclaration, notamment d’incident, d’accident, d’évènement significatif ou d’anomalie, concernant :
– les matières nucléaires soumises au régime de la protection et du contrôle des matières nucléaires, de leurs installations et de leurs transports ;
– les transports de substances radioactives ;
– les installations et activités nucléaires intéressant la défense, les installations nucléaires intéressant la dissuasion et les transports des matières nucléaires affectées à celles-ci.

Le 10° porte sur les délais concernant les demandes d’attribution de logements destinés aux étudiants et gérés par les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (163 000 logements étudiants).

Le calendrier de cette procédure d’attribution s’articule en effet avec ceux des demandes d’inscription dans les établissements d’enseignement supérieur (Parcoursup) et des demandes d’obtention des bourses sur critères sociaux qui demeurent inchangés compte tenu des modalités exceptionnelles de délivrance du baccalauréat.

En outre, une phase complémentaire permet d’ores et déjà de gérer les demandes tardives.
Ainsi, l’application des dispositions de l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 pourrait gravement perturber le bon déroulement des opérations d’attribution des logements étudiants dont le nombre est par définition limité.

Le 11° exclut les délais applicables aux appels à projets des personnes publiques donnant lieu à une aide publique.

Les personnes publiques ont de plus en plus souvent recours au mécanisme des appels à projets notamment pour subventionner des actions qui concourent à la mise en œuvre des politiques publiques (ex : Agence nationale de la recherche).

L’application des dispositions de l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 pourrait paralyser le recours à ces appels à projets en imposant un report de plusieurs mois des délais laissés aux candidats pour présenter leurs projets.

Dans un autre domaine qui intéressera évidemment les magistrats, les professionnels du droit et les auxiliaires de justice, l’article 2 de l’ordonnance du 15 avril 2020 vise à préciser le sens et la portée de l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020.

Il nous est dit que l’article 2 de cette ordonnance ne constitue ni une suspension, ni une prorogation du délai initialement imparti pour agir.

Le mécanisme mis en œuvre par cet article permet simplement de considérer que l’acte ou la formalité réalisé jusqu’à la fin du délai initial, calculé à compter de la fin de la période visée à l’article 1er (état d’urgence sanitaire + un mois), dans la limite de deux mois, sera réputé valablement fait.
Il s’agit de permettre d’accomplir a posteriori (et comme si le délai avait été respecté) ce qu’il a été impossible de faire pendant la période d’urgence sanitaire augmentée un mois.

Ce mécanisme ne peut fonctionner que si le délai pour agir est « prescrit » par la loi ou le règlement, « à peine » d’une sanction ou de la déchéance d’un droit.

La faculté de rétractation ou de renonciation, c’est-à-dire le délai laissé par certains textes avant l’expiration duquel son bénéficiaire peut rétracter son consentement à un contrat, n’est pas un acte « prescrit » par la loi ou le règlement « à peine » d’une sanction ou de la déchéance d’un droit.

Les délais pour se rétracter ou renoncer à un contrat, par exemple en matière de vente à distance ou de contrats d’assurance ou de services financiers à distance, d’assurance-vie ou encore de vente d’immeubles à usage d’habitation relevant de l’article L. 271-1 du code de la construction et de l’habitation, sont donc exclus du champ de l’article 2 de l’ordonnance précitée.

Une lecture contraire aurait pour effet de paralyser nombre de transactions. Il en est de même des délais de réflexion : ces délais avant l’expiration desquels le destinataire d’une offre contractuelle ne peut manifester son acceptation sont exclus du champ de l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020.

En effet il ne s’agit pas d’un acte devant être réalisé pendant un certain délai à peine de sanction mais seulement d’un temps imposé au futur contractant pour réfléchir à son engagement.

. L’exclusion concerne également les délais prévus pour le remboursement d’une somme d’argent en cas d’exercice du droit de rétractation ou de renonciation.

En revanche, les délais pour la restitution d’autres biens sont bien inclus dans le champ d’application du texte.

Cet article 2 a un caractère interprétatif : il ne modifie pas la portée de l’article 2 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 mais explicite que depuis l’origine, celui-ci ne s’applique pas aux délais de réflexion et de rétractation.

Dès lors, il a un caractère nécessairement rétroactif.

Par ailleurs, on se souviendra que l’article 3 de la même ordonnance du 25 mars 2020 fixe la liste des mesures judiciaires et administratives dont l’effet est prorogé de plein droit pour une durée de deux mois à compter de l’expiration de la période définie au I de l’article 1er, dès lors que leur échéance est intervenue dans cette période, sauf si elles sont levées ou leur terme modifié par l’autorité compétente entre temps.

L’article 3 de l’ordonnance du 15 avril 2020 vient préciser l’interprétation de l’article 3 de l’ordonnance no 2020-306, relatif à la prorogation des mesures administratives et juridictionnelles en cours, afin que cette prorogation de plein droit ne puisse pas être interprétée comme un dessaisissement des autorités compétentes.

Cet article précise donc que la prorogation ne fait pas obstacle à ce que le juge ou l’autorité compétente modifie ces mesures, y mette fin ou encore, si les intérêts dont ils ont la charge le justifient, prescrive leur application ou en ordonne de nouvelles pour la durée qu’il détermine.
L’article 3 prévoit en effet une prorogation supplétive qui joue en l’absence de décision prise par l’autorité compétente dans la période juridiquement protégée.

S’agissant des mesures que l’autorité pourrait ordonner pendant cette période, il lui incombe de prendre en considération les difficultés résultant de la crise sanitaire.

Autre point : L’article 4 de l’ordonnance du 15 avril 2020 modifie et complète l’article 4 de l’ordonnance n° 2020-306 relatif au cours des astreintes et à l’application des clauses pénales, clauses résolutoires et clauses de déchéance.

Premièrement, s’agissant des clauses et des astreintes qui sanctionnent l’inexécution d’une obligation échue pendant la période juridiquement protégée, la présente ordonnance modifie la date à laquelle ces clauses et astreintes prendront leur cours ou leur effet.

Le report n’est plus forfaitairement fixé à un mois, comme initialement prévu, mais il sera égal à la durée d’exécution du contrat qui a été impactée par les mesures résultant de l’état d’urgence sanitaire.

Le Gouvernement nous donne l’exemple suivant : si une échéance était attendue le 20 mars 2020, c’est-à-dire huit jours après le début de la période juridiquement protégée, la clause pénale sanctionnant le non-respect de cette échéance ne produira son effet, si l’obligation n’est toujours pas exécutée, que huit jours après la fin de la période juridiquement protégée.

De même, si une clause résolutoire, résultant d’une obligation née le 1er avril devait prendre effet, en cas d’inexécution, le 15 avril, ce délai de 15 jours sera reporté à la fin de la période juridiquement protégée pour que le débiteur puisse encore valablement s’acquitter de son obligation avant que la clause résolutoire ne prenne effet.

Deuxièmement, l’ordonnance du 15 avril 2020 ajoute à l’article 4 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 un dispositif de report du cours des astreintes et de la prise d’effet des clauses pénales, résolutoires et de déchéance lorsque celles-ci sanctionnent l’inexécution d’une obligation, autre que de somme d’argent, prévue à une date postérieure à la fin de la période juridiquement protégée.
En effet, même après l’expiration de cette période, certains débiteurs d’une obligation de faire se trouveront, du fait des difficultés imposées par le confinement, dans l’impossibilité de respecter les échéances auxquelles ils sont engagés.

Ce report sera également calculé, nous dit-on, après la fin de la période juridiquement protégée, en fonction de la durée d’exécution du contrat qui a été impactée par les contraintes du confinement.

Le Gouvernement en donne un exemple : si un contrat de travaux antérieur au 12 mars 2020 prévoit la livraison du bâtiment à une date qui échoit après la fin de la période juridiquement protégée, la clause pénale sanctionnant l’éventuelle inexécution de cette obligation ne prendra effet qu’à une date reportée d’une durée égale à la durée de la période juridiquement protégée.

Les clauses et astreintes sanctionnant les obligations de sommes d’argent sont exclues de ce second dispositif applicable aux échéances postérieures à la fin de la période juridiquement protégée.

En effet, l’incidence des mesures résultant de l’état d’urgence sanitaire sur la possibilité d’exécution des obligations de somme d’argent n’est qu’indirecte et, passé la période juridiquement protégée, les difficultés financières des débiteurs ont vocation à être prises en compte par les règles de droit commun (délais de grâce, procédure collective, surendettement).

Les parties au contrat restent libres d’écarter l’application de cet article par des clauses expresses notamment si elles décident de prendre en compte différemment l’impact de la crise sanitaire sur les conditions d’exécution du contrat.

Elles peuvent également décider de renoncer à se prévaloir des dispositions de cet article.

On relèvera que le titre II de l’Ordonnance du 15 avril 2020 modifie les dispositions particulières aux délais et procédures en matière administrative.

L’article 5 modifie la durée de suspension des délais pour la consultation ou la participation du public.

Ces délais sont suspendus jusqu’à l’expiration d’une période de sept jours suivant la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire alors qu’ils l’étaient par l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 jusqu’à la fin du mois suivant la fin de l’état d’urgence sanitaire.

Il sera ainsi permis de ne pas retarder davantage l’organisation et la tenue de procédures de consultation et de participation du public qui avaient été engagées ou programmées avant la déclaration de l’état d’urgence, ce qui contribuera à favoriser la relance économique.

Par ailleurs, cet article prévoit que les délais applicables aux procédures en matière de rupture conventionnelle dans la fonction publique, notamment le délai de rétractation, sont suspendus selon le droit commun fixé par l’article 7 de l’ordonnance du 25 mars 2020 précitée.

L’article 6 modifie l’article 8 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 qui suspend les délais dans lesquels les personnes publiques et privées doivent réaliser des travaux et des contrôles ou se conformer à des prescriptions de toute nature.

Cet article précise que l’autorité administrative peut néanmoins, pendant la période du 12 mars 2020 à la fin de l’état d’urgence sanitaire augmentée d’un mois, exercer ses compétences pour modifier ces obligations ou y mettre fin, ou, lorsque les intérêts dont elle a la charge le justifie, pour prescrire leur application ou en ordonner de nouvelles, dans le délai qu’elle détermine.

Dans tous les cas, l’autorité administrative tient compte, dans la détermination des obligations ou des délais à respecter, des contraintes liées à l’état d’urgence sanitaire.

Par ailleurs, l’article 7 complète l’article 9 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020. Il prévoit deux nouveaux motifs qui permettront par décret de déterminer les actes, procédures ou obligations pour lesquels les délais reprennent.

Il s’agit, pour le Gouvernement, de la sauvegarde de l’emploi et de l’activité ainsi que de la sécurisation des relations de travail et de la négociation collective.

Le titre III de l’Ordonnance du 15 avril 2020 comporte des dispositions diverses.

D’abord on signalera l’article 8 qui crée un titre II bis au sein de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 dédié aux enquêtes publiques et aux procédures en matière d’urbanisme et d’aménagement.

En premier lieu, notez que le nouvel article 12 bis fixe des règles se substituant à celles prévues par l’article 2 de l’ordonnance no 2020-306 du 25 mars 2020, s’agissant du report des délais des recours applicables à l’ensemble des autorisations de construire.

Dans le domaine de la construction, l’ensemble du processus (financements, actes notariés, chantiers) se trouve en effet bloqué tant que les délais de recours contre l’autorisation de construire ne sont pas purgés.

De ce fait, le mécanisme de l’article 2, qui conduit à ce qu’une autorisation de construire délivrée près de deux mois avant la déclaration de l’état d’urgence sanitaire puisse être contestée dans un nouveau délai de trois mois à compter de la cessation de celui-ci risque, en paralysant le secteur de la construction, de constituer un frein important à la relance de l’économie, alors même que, dès la fin de la période d’état d’urgence sanitaire, les recours pourront s’exercer dans les conditions normales.

L’article 8 remplace donc, pour les recours contre de telles autorisations, le mécanisme de l’article 2 par un système de suspension des délais, qui reprendront leur cours là où il s’était arrêté dès la cessation de l’état d’urgence sanitaire, tout en sanctuarisant un minimum de sept jours pour permettre aux justiciables de saisir la juridiction.

En deuxième lieu, le nouvel article 12 ter prévoit une dérogation à l’article 7 de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020, pour permettre que les délais d’instruction administratifs des autorisations d’urbanisme reprennent leur cours dès la cessation de l’état d’urgence sanitaire, et non un mois plus tard.

Là encore, l’objectif est de relancer aussi rapidement que possible, une fois passée la période de crise sanitaire, le secteur de l’immobilier, en retardant au minimum la délivrance des autorisations d’urbanisme.

En troisième lieu et dans le même esprit, l’article 12 quater prévoit la même adaptation des délais relatifs à l’exercice du droit de préemption impartis pour répondre à une déclaration d’intention d’aliéner.

En effet, la suspension de ces délais a pour conséquence, tant que le bénéficiaire du droit de préemption ne s’est pas expressément prononcé, d’empêcher la vente du bien foncier ou immobilier concerné. Il apparaît donc opportun de limiter cette suspension à la seule période de l’état d’urgence sanitaire.

Enfin, les délais de participation du public aux décisions ayant une incidence sur l’environnement nécessaires aux jeux Olympiques et Paralympiques 2024 ont été gelés par l’article 7 de l’ordonnance no 2020-306 du 25 mars 2020 et ne sont pas susceptibles d’être dégelés sur le fondement de son article 9, faute de se rattacher à l’un des motifs prévus pour une telle dérogation.

Le Gouvernement considère pourtant que les modalités de cette participation, qui s’effectue par voie électronique dans les conditions définies à l’article L. 123-19 du code de l’environnement, apparaissent compatibles avec l’état d’urgence sanitaire.

Dès lors, afin d’éviter un retard dans la tenue et l’organisation de ces procédures qui entraînerait un glissement des calendriers de mise en œuvre du projet, l’article 12 quinquies prévoit que le cours des délais reprend pour les participations du public par voie électronique dans le cadre de la préparation et de l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.

Enfin, point important en matière de contentieux des étrangers, l’article 9 modifie les dispositions de l’article 15 de l’ordonnance no 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l’ordre administratif, lequel a prévu des règles de computation des délais de recours contentieux ouverts contre les décisions en matière d’éloignement et d’asile dérogatoires à celles fixées à l’article 2 de la même ordonnance.

D’une part, le point de départ du délai de recours ouvert contre les obligations de quitter le territoire français (OQTF), les arrêtés de transfert Dublin et les décisions de la Cour nationale du droit d’asile est reporté au lendemain de la fin de l’état d’urgence sanitaire, et non un mois après la fin de cette période, en raison du caractère suspensif d’exécution de ces recours.

Cette dérogation n’inclut pas les décisions qui peuvent assortir l’OQTF (délai de départ volontaire mentionné aux articles L. 511-1 et L. 511-3-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, décision fixant le pays de renvoi mentionnée à l’article L. 513-3, interdiction de retour et interdiction de circulation sur le territoire français mentionnées aux articles L. 511-1 et L. 511-3-2, assignation à résidence mentionnée à l’article L. 561-1) et dont le point de départ du délai de recours sera donc différent de celui du délai ouvert pour contester l’OQTF.

Il en résultera pour les juridictions, à la fin de l’état d’urgence sanitaire, la nécessité d’organiser plusieurs audiences successives pour statuer sur ces différents recours.

Afin de pallier cette difficulté, le Gouvernement a décidé de reporter le point de départ du délai de recours de ces mesures à la même date que pour les OQTF, à savoir au lendemain de la fin d’état d’urgence sanitaire.

D’autre part, les délais applicables devant le juge des libertés et de la détention en rétention administrative n’ont pas fait l’objet d’adaptations.

La rédaction du 2° du II de l’article 15 ne mentionne toutefois pas le placement en rétention des personnes faisant l’objet d’un arrêté de transfert Dublin, prévu par le II de l’article L. 742-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

S’il est vrai que le II de cet article renvoie au III de l’article L. 512-1, il semble préférable, pour sécuriser ces procédures, de prévoir expressément que le placement en rétention d’une personne faisant l’objet d’un tel arrêté de transfert suit le même régime que la rétention en général, à savoir que les délais applicables devant le juge des libertés et de la détention ne font pas l’objet d’adaptations.

L’article 10 précise les conditions d’application outre-mer.

CONCLUSIONS :

Le Gouvernement ne cesse d’adapter la législation aux circonstances qu’imposent les mesures sanitaires de lutte contre l’épidémie.

Les juristes doivent donc surveiller comme le lait sur le feu toutes ces modifications législatives qui interviennent du jour au lendemain.

C’est la veille juridique à laquelle s’astreint quotidiennement les membres du cabinet EMO AVOCATS afin de vous tenir informer au plus vite.

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Courage à vous toutes et tous.

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Contacts :

Arnaud de SAINT REMY
Avocat Associé – Ancien Bâtonnier de l’Ordre des avocats
Ancien président de la Conférence Régionale des Bâtonniers de Normandie
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