Coronavirus Covid-19 : Fonds de solidarité, tous concernés ? Qui sera vraiment bénéficiaire de l’aide versée par ce fonds créé pour faire face aux conséquences économiques de la crise sanitaire ?

Coronavirus Covid-19 : Fonds de solidarité, tous concernés ? Qui sera vraiment bénéficiaire de l’aide versée par ce fonds créé pour faire face aux conséquences économiques de la crise sanitaire ?

L’ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 a institué un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la crise sanitaire.

Ce fonds institué pour une durée de trois mois, dit le texte, a pour objet le versement d'aides financières aux personnes physiques et morales de droit privé exerçant une activité économique particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation du covid-19 et des mesures prises pour en limiter la propagation.

Or, les conditions posées par le gouvernement pour en bénéficier apparaissent assez restreintes et cela conduit à penser que ces aides ne concerneront finalement qu’un nombre limité de TPE, voire seulement des micro-entreprises et certains auto-entrepreneurs.

Si c’est votre cas, vous pourriez être intéressé malgré tout.

Explications

Le Décret N°2020-371 du 30 mars 2020 « relatif au fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation » vient d’être publié au JORF n°0078 de ce mardi 31 mars 2020.

On peut y lire que :

Ce fonds, financé notamment par l’Etat, les régions, les collectivités d’outre-mer et les assureurs, bénéficie aux personnes physiques (travailleurs indépendants, artistes-auteurs, etc...) et aux personnes morales de droit privé (sociétés, associations, etc...) exerçant une activité économique et remplissant les conditions suivantes :

- L’effectif est inférieur ou égal à dix salariés ;

- Le chiffre d’affaires hors taxes lors du dernier exercice clos est inférieur à un million d’euros ;

- Le bénéfice imposable augmenté le cas échéant des sommes versées au dirigeant au titre du dernier exercice clos est inférieur à 60 000 euros ;

En outre, les entreprises éligibles ont :

- Soit, fait l’objet d’une interdiction administrative d’accueil du public entre le 1er et le 31 mars 2020,

- Soit, subi une perte de chiffre d’affaires supérieure à 70 % pendant cette période par rapport à l’année précédente (Mise à jour au 31/03/2020 : Le Ministre de l'Economie vient d'annoncer à la presse que la condition de perte de CA passerait à 50%. A voir dans un prochain décret).

Les personnes titulaires d’un contrat de travail à temps complet ou d’une pension de vieillesse ou ayant bénéficié d’indemnités journalières de sécurité sociale d’un montant supérieur à 800 euros sur la période sont exclues du dispositif.

Les bénéficiaires percevront sur demande une aide forfaitaire de 1 500 euros (ou une aide égale à leur perte de chiffre d’affaires si celle-ci est inférieure à 1 500 euros).

La demande d’aide devra être réalisée par voie dématérialisée, au plus tard le 30 avril.

Nous mettons en ligne ci-dessous un document explicatif permettant de d’accéder au formulaire sur le site https://www.impots.gouv.fr/portail/

Ajoutons que ces personnes pourront aussi bénéficier d’une aide complémentaire forfaitaire de 2 000 euros lorsqu’elles emploient au moins un salarié, qu’elles se trouvent dans l’impossibilité de régler leurs dettes à trente jours et qu’elles se sont vu refuser un prêt de trésorerie par leur banque.

La demande d’aide complémentaire devra être réalisée par voie dématérialisée, au plus tard le 31 mai, et sera instruite par les services des conseils régionaux.

Que faut-il penser de ce dispositif d’aides instituées au travers de la création de ce fonds de solidarité ?

C’est évidemment mieux que rien.

L’Etat, avec les Régions et les assureurs, fait un effort financier, c’est vrai

La mesure pourra ainsi apparaître avantageuse pour certains, mais décevante et peu adaptée pour d’autres.

En réalité, le nombre de personnes physiques ou d’entreprises susceptibles d’être éligibles à ces aides est limité à celles dont les bénéfices imposables sont les plus faibles.

Certes, cela est louable et tant mieux pour celles et ceux qui y seront éligibles.

Mais, cela laisse au bord du chemin un nombre non négligeable de TPE, PME, indépendants, professions libérales ou commerçants qui emploient plusieurs salariés (dont la prise en charge du chômage partiel ne sera pas de nature à compensment les pertes de chiffres d’affaires, fussent-elles inférieures à 70% par rapport à l’année dernière).

Les aides proposées compenseront mal la réalité de la perte de chiffre subi en mars et/ou avril ; Ainsi, pour que l’aide de 1.500 € soit réellement « intéressante » (ou compensatrice du préjudice financier subi du fait la perte de chiffres d’affaires), il faudrait avoir un bénéfice net imposable de moins de 25.714,28 € annuel (puisque si 1.500 € représentent une perte de 70% du CA, cela signifie un CA mensuel de 2.142,85 €, soit 25.714,28 € annuel).

Donc, tous ceux qui ont un bénéfice imposable (augmenté le cas échéant des sommes versées au dirigeant au titre du dernier exercice clos) compris entre 25.714,28 € et 60 000 € resteront, quoiqu’il arrive, perdants…

Par exemple, ceux qui sont au plafond de 60.000 € doivent avoir accusé a minima une perte de résultat de 3.500 € (70% de 5.000 € en moyenne sur le mois de mars et idem en avril) pour avoir l’aide de 1.500 €…

Et ce n’est que du résultat… cela ne tient pas compte des charges qui, elles, vont avoir demeuré.

En outre, rien ne dit que la perte de chiffres d’affaires sera ressentie en mars ou en avril 2020 puisque le mois de mars, à tout le moins, correspond à un chiffre d’affaires réalisé souvent pour des commandes passées aux mois de janvier ou février précédents. Il y a toujours un décalage de plusieurs semaines. Ensuite, le mois d’avril sera sans doute plus impacté.

Ensuite, rien ne dit si c’est du chiffre d’affaires en comptabilité d’encaissement ou en en comptabilité d’engagement.

Tout le dispositif repose finalement sur une comparaison entre le mois de mars 2020 et le mois de mars 2019 (ou pour les entreprises créées postérieurement, par rapport au chiffre d’affaires mensuel moyen sur la période comprise entre la date de création de l’entreprise et le 29 février 2020).

Et, bien sûr, tous ceux qui dépassent 60.000 € (indépendamment du nombre d’associés) ne seront pas éligibles.

Bref, cette mesure sera sans doute utile pour les plus petites entreprises, mais elle risque d’être ressentie comme insuffisante pour les structures de taille moyenne ou plus importantes alors même qu’elles emploieraient des salariés dont le poste de travail est menacé.

Le risque est de conduire celles-là à des procédures collectives avec ou sans plan de redressement que le gouvernement souhaite à tout prix éviter.

L'important pour toutes les entreprises sera de s'entourer des conseils les plus efficients pour comprendre et anticiper l'avenir.

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Contacts :

Arnaud de SAINT REMY
Avocat Associé – Ancien Bâtonnier de l’Ordre des avocats
Ancien président de la Conférence Régionale des Bâtonniers de Normandie
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