Retraits d'emplois de professeurs des écoles et fermetures de classes : le cabinet EMO Avocats obtient la suspension de plusieurs décisions

Retraits d'emplois de professeurs des écoles et fermetures de classes : le cabinet EMO Avocats obtient la suspension de plusieurs décisions

Chaque année, l’élaboration de la carte scolaire dans le premier degré suscite des craintes liées à la suppression de postes d’enseignants et à la fermeture de classes.

Ces craintes sont d’autant plus prégnantes en milieu rural, compte tenu des enjeux que représente l’école, source de vitalité pour les petites communes : l’école n’est pas le simple lieu de la transmission des savoirs, mais constitue bel et bien un espace de sociabilité pour les habitants des territoires ruraux : elle se trouve au cœur de la vie communale.

Le retrait d’un emploi de professeur des écoles est d’autant plus dommageable pour les communes pourvues d’une école élémentaire à classe unique comptant plusieurs niveaux, hypothèse fréquente en milieu rural : dans ces conditions, le retrait d’emploi entraîne inévitablement la fermeture définitive de l’école communale.

Sensible à cette problématique, le cabinet EMO HEBERT accompagne depuis deux ans les communes touchées par ces mesures dans le cadre de procédures d’urgence engagées devant le tribunal administratif visant à obtenir la suspension de telles décisions.

En l’occurrence, l’issue favorable d’un référé suspension est subordonnée, outre la démonstration de l’urgence, à une critique utile de la procédure suivie pour l’élaboration du projet de carte scolaire et/ou à l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation entachant la décision de retrait d’emploi.

En ce qui concerne la procédure suivie pour l’élaboration du projet de carte scolaire, il résulte de la combinaison des dispositions des articles D. 211-9 du code de l’éducation et 47 du décret n°2011-184 du 15 février 2011 que le comité technique spécial départemental, qui par sa composition assure notamment la représentation des personnels des écoles, doit rendre un avis sur le projet de carte scolaire dont il est saisi, avis dont l’existence doit ressortir, à tout le moins des mentions du procès-verbal s’il n’est pas formalisé dans un document spécifique.

L’absence d’émission d’un avis du comité technique spécial départemental constitue certes un vice de procédure susceptible d’affecter la légalité d’une décision de retrait d’emploi prise par l’inspecteur d’académie.

Encore faut-il néanmoins que ce vice présente un caractère « substantiel » pour justifier l’annulation de cette décision ou, dans le cas présent, sa suspension

De fait, il est désormais constant qu’« un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie » (CE, Ass, 23/12/2011, n°335033).

Il a ainsi été soutenu que l’absence d’avis régulièrement émis par le comité technique spécial départemental était de nature à avoir privé la communauté éducative des écoles du département, et notamment les communes concernées par le projet de carte scolaire, d’une garantie liée à leur participation effective et éclairée à la communauté éducative, laquelle découlerait de l’article L. 111-3 du code de l’éducation.

Cette position a emporté la conviction du juge des référés du tribunal administratif de Rouen qui, par plusieurs ordonnances, a prononcé, notamment pour ce motif, la suspension de six décisions de retrait d’emploi.

(TA Rouen, ord. 19/07/2017, n°1701967, 1701978, 1701981, 1702028 ; et 11/08/2017 n° 1702228 et 1702229)

En outre, dans certains cas, le moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation a prospéré compte tenu de l’absence de précision apportée par l’administration quant aux critères ayant présidé à la décision de suppression d’un poste alors qu’elle avait elle-même constaté une augmentation des effectifs dans certaines des écoles concernées et que la scolarisation des enfants dans les classes d’une commune voisine, compte tenu de la distance, était de nature à nuire à leur bonne scolarité.

« En l’état de l’instruction, et compte-tenu notamment d’une part, de l’absence de toute précision apportée par l’administration, tant dans ses écritures que dans ses observations orales, sur les critères l’ayant amenée à prendre la décision de suppression d’un poste d’enseignant alors que les effectifs d’élèves sont soit stables soit en voie d’augmentation prochaine compte tenu de la création de nouveaux logements dans la commune, et, d’autre part, de ce que les enfants de l’école élémentaire devraient être inscrits à l’école de la commune d’Auffay distante d’environ 7,5 km, les moyens tirés de l’absence d’avis régulièrement émis par le comité technique spécial départemental en méconnaissance des dispositions de l’article D. 211-9 du code de l’éducation ainsi que de l’erreur manifeste d’appréciation dont est entachée la décision contestée, qui ne doit pas nuire à la bonne scolarité des enfants concernés, sont propres à faire naître un doute sérieux quant à la légalité des décisions des 22 mars et 24 mai 2017 contestées »

(TA Rouen, ord. 19/07/2017, Commune de Saint-Hellier, n°1702028)

Il est ainsi permis aux communes touchées par de telles mesures de garder espoir et de saisir utilement le juge administratif.

Pour tous renseignements, vous pouvez contacter :

Sandrine GILLET
Avocat associée en charge du Pôle Droit administratif du cabinet EMO HEBERT, titulaire du certificat de spécialisation en droit public, et son équipe
sgillet@emo-hebert.com