Actualités législatives : La commission des Lois du Sénat a adopté, le 3 mai, la proposition de loi visant à garantir le respect du droit à l’image des enfants.

Actualités législatives : La commission des Lois du Sénat a adopté, le 3 mai, la proposition de loi visant à garantir le respect du droit à l’image des enfants.

L’Assemblée nationale avait adopté, le 6 mars 2023, une proposition de loi (PPL) visant à garantir le respect du droit à l’image des enfants . La commission des Lois du Sénat vient d'adopter, le 3 mai, cette proposition de loi qui sera examinée en séance publique le 10 mai 2023. Elle tend à responsabiliser les parents sur le droit à l'image des enfants et à protéger ces derniers contre les dérives et les atteintes à l'intimité de leur vie privée.

Quels sont les objectifs de la PPL ?

« La question du droit à l'image des enfants [est] à la confluence entre les enjeux d'exploitation commerciale, de harcèlement et de pédocriminalité » indiquait l'exposé des motifs de la proposition de loi déposée au début de l'année. Or, dans de nombreux cas, il est vrai, ces images sont diffusées sur les réseaux sociaux par les parents eux-mêmes, dans le même élan de partage qui les poussent à exposer leur propre vie privée ou dans le but d'attirer des abonnés ou d'augmenter leur nombre de vues, sans qu'ils aient forcément conscience des conséquences pour leur enfant.

Selon une étude de l'Observatoire de la parentalité et de l'éducation numérique (OPEN), 53 % des parents français ont déjà partagé sur les réseaux sociaux du contenu sur leur(s) enfant(s) : 43 % ont commencé dès la naissance de l'enfant et 91 % ont commencé avant ses 5 ans.

Les auteurs de la proposition de loi visant à garantir le respect du droit à l'image des enfants, Bruno Studer, Aurore Bergé et Éric Poulliat notamment, entendent répondre à cette problématique en modifiant les règles du code civil relatives à l'autorité parentale, pour y intégrer le respect de la vie privée et le droit à l'image et ainsi mieux sensibiliser les parents quant à cette dimension nouvelle de l'exercice de l'autorité parentale.

Au rapport de Valérie Boyer, la commission des lois du Sénat a envisagé d'intégrer la notion de vie privée de l'enfant dans la définition de l'autorité parentale, tout en en rendant plus effective la protection, en soumettant la diffusion au public d'images de l'enfant à l'accord des deux parents et en permettant plus facilement à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) d'agir en référé dès lors que des données à caractère personnel de mineurs sont en jeu.

Cinq propositions d'amendements

On relève l’adoption de 5 amendements au texte adopté à l'Assemblée Nationale :

Le n°1 visant à réintroduire l’obligation des parents à veiller au respect de la vie privée de leur enfant au titre des prérogatives liées à l’exercice de l’autorité parentale (rédaction supprimée lors de l’examen du texte à l’Assemblée nationale) ;

Le n°2 supprimant l’article 2 de la PPL qui precisait que le droit à l’image de l’enfant mineur est exercé en commun par les deux parents et que ceux-ci associent l’enfant à l’exercice de ce droit, selon son âge et son degré de maturité ;

Le n°3 réécrivant l’article 3 de la PPL afin de prévoir que la diffusion au public de contenus relatifs à la vie privée d'un enfant nécessite l'accord des deux parents ;

Le n°4 supprimant l’article 4 de la PPL créant un nouveau cas de délégation partielle de l'autorité parentale en cas de diffusion de l'image de l'enfant portant gravement atteinte à sa dignité ou à son intégrité morale.

Le n°5 permettant à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) de saisir les juridictions compétentes pour demander le blocage d’un site internet en cas d’atteinte aux droits des mineurs.

Le texte ainsi adopté par la commission des Lois du Sénat :

- introduit la protection de la vie privée de l’enfant dans la définition de l’autorité parentale (article 1er) ;

- prévoit que la diffusion au public de contenus relatifs à la vie privée d'un enfant nécessite l'accord des deux parents  (article 3) ;

- permet à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) de saisir les juridictions compétentes pour demander le blocage d’un site internet en cas d’atteinte aux droits des mineurs (article additionnel)

Adoption prévue d'ici la fin du premier semestre 2023

L'apport de la loi consiste notamment à compléter l’article 372-2 du code civil par un alinéa ainsi rédigé : « La diffusion au public de contenus relatifs à la vie privée de l’enfant fait l’objet d’un accord de chacun des parents. »

Il est par ailleurs recommandé :

● La création d’une page dans le carnet de santé comprenant des informations sur
l’exposition des écrans quels qu’ils soient, en deux volets. Un premier volet sur « la
consommation » d’écrans par les enfants en fonction de leur âge. Un second volet sur le sujet de cette proposition de loi, à savoir l’exposition des enfants sur les réseaux sociaux et leur vie privée avec une référence à la loi examinée ;

● L’élaboration d’un véritable programme de santé publique3 permettant à chaque âge, de
la crèche, à la maternelle et jusqu’à la fin du lycée, d’établir des critères précis sur les acquis
que les enfants doivent connaître comme les « dangers ».

L’article 2 de la PPL initiale tendait à préciser que le droit à l’image de l’enfant mineur est exercé en commun par les deux parents et qu’ils doivent y associer l’enfant selon son âge et son degré de maturité (article 372 du code civil). C'est sans doute une évidence. Mais, il est sans doute bon de rappeler les évidences.

L’article 3 prévoit qu’en cas de désaccord entre les parents quant à l’exercice des actes
non-usuels relevant du droit à l’image de l’enfant, le juge aux affaires familiales (JAF) peut
interdire à l’un des parents de publier ou de diffuser tout contenu sans l’autorisation
de l’autre parent – ces mesures pouvant être ordonnées en référé en cas d’urgence
(article 373-2-6 du code civil).

L’article 4 ouvrirait la voie à une délégation forcée de l’exercice du droit à l’image de
l’enfant lorsque la diffusion de l’image de celui-ci porte gravement atteinte à sa dignité ou
son intégrité morale (article 377 du code civil). La commission des lois recommande la suppression de cette possibilité. Ce point fera très probablement le plus débat devant les sénateurs du Palais du Luxembourg.

A suivre donc...

Les droits des enfants doivent être protégés

Cette loi va dans le sens de la protection renforcée des droits des enfants.

En cas de violation de ces droits, l'un des parents en désaccord avec l'autre, l'enfant lui-même, le ministère public, l'autorité départementale ou tout intéressé pourrait saisir un juge afin de respecter les droits de l'enfant concerné. Actuellement, une action devant le juge des référés est toujours possible.

Et pour rappel, l'enfant a le droit d'être assisté par un avocat, dans toutes les procédures le concernant.

Pour aller plus loin, contactez-nous

Par mail adestremy@emo-avocats.com ou par téléphone au 02 35 59 83 63

Arnaud de SAINT REMY
Avocat Associé en charge du Pôle pénal du Cabinet EMO AVOCATS

Ancien Bâtonnier de l’Ordre des avocats
Vice-Président de la Commission Libertés & Droits de l'Homme au Conseil national des barreaux - Responsable du groupe de travail "mineurs"

POUR CONSULTER LA LOI EN CONSTRUCTION, SUIVRE LE LIEN : HTTPS://WWW.SENAT.FR/DOSSIER-LEGISLATIF/PPL22-396.HTML