Location touristique : à qui revient la rémunération ?

Location touristique : à qui revient la rémunération ?

A l’heure où les locations touristiques consenties par des particuliers se multiplient, la question posée est d’importance.

AIRBNB qui se pose en leader mondial de la location de vacances annonce officiellement un panel de 7.000.000 de logements sur près de 81.000 destinations.

Toute une série d’autres plateformes voit le jour et tente de profiter de cette part de marché.

La tentation est grande pour tout à chacun de louer son logement via des plateformes internet.

Les bailleurs, professionnels, ou non peuvent s’en émouvoir.

Leurs locataires qui sous-louent ainsi leur logement peuvent espérer des revenus plus ou moins réguliers allant jusqu’à excéder le montant des loyers perçus par les propriétaires !

Que dit le droit ?

La sous-location est généralement (pour ne pas dire toujours) interdite par les clauses du bail.

Le débat anime les tribunaux depuis déjà quelque temps.

Les propriétaires se fondaient généralement sur une responsabilité contractuelle du preneur.

Ce qui suppose une triple démonstration à la charge du demandeur :

 L’existence d’une faute qui se déduit, il est vrai, d’une sous-location irrégulière ;
 Un lien de causalité avec un préjudice ;
 Un préjudice.

C’était sans compter sur le droit d’accession de l’article 547 du Code Civil.

Il accorde aux propriétaires un droit aux fruits produits par la chose.

Dans un arrêt très attendu du 12 septembre 2019, la Cour de Cassation consacre cette solution novatrice.

Les faits étaient on ne peut plus simples.

Un appartement avait été sous-loué par le locataire.

Le bailleur demandait le remboursement des sous-loyers en vertu de son droit d’accession.

Le locataire lui opposait que, nonobstant l’irrégularité de la sous-location, les sous-loyers étaient l’équivalent économique de son droit de jouissance qu’il était en droit de percevoir et de conserver, de telle sorte que le propriétaire aurait dû démontrer l’existence d’un préjudice.

En germe, cette argumentation visait essentiellement à soutenir que le propriétaire n’aurait pu réclamer que la différence entre les loyers qu’il avait perçus et le montant des sous-loyers dont le locataire avait lui-même bénéficié.

Par un attendu de principe, la Cour de Cassation indique que :

« Sauf lorsque la sous-location est autorisée par le bailleur, les sous-loyers perçus par le preneur constituent des fruits civils qui appartiennent par accession au propriétaire ; qu’ayant relevé que les locataires avaient sous-loué l’appartement pendant plusieurs années sans l’accord du bailleur, la Cour d’Appel en a déduit, à bon droit, nonobstant l’inopposabilité de la sous-location au bailleur, que les sommes perçues à ce titre devaient lui être remboursées ».

Comme le souligne cette décision, sa portée est limitée à la sous-location irrégulière.

Dans les rares cas où la sous-location est autorisée, elle doit répondre aux exigences de l’article 8 de la loi du 6 juillet 1989 fixant le régime du bail d’habitation :

« Le locataire ne peut ni céder le contrat de location, ni sous-louer le logement sauf avec l'accord écrit du bailleur, y compris sur le prix du loyer. Le prix du loyer au mètre carré de surface habitable des locaux sous-loués ne peut excéder celui payé par le locataire principal. Le locataire transmet au sous-locataire l'autorisation écrite du bailleur et la copie du bail en cours.
En cas de cessation du contrat principal, le sous-locataire ne peut se prévaloir d'aucun droit à l'encontre du bailleur ni d'aucun titre d'occupation.
Les autres dispositions de la présente loi ne sont pas applicables au contrat de sous-location. »

En somme, ce qu’il faut retenir de cet arrêt, c’est que la sous-location est soumise à une option.

Si elle n’a pas été autorisée par le bailleur, le locataire risque de consentir en pure perte la sous-location puisque la rémunération qu’il en percevra doit revenir au propriétaire.

Si le locataire a pris la précaution de demander l’autorisation du propriétaire, ils doivent s’entendre sur le prix du loyer de la sous-location.

Le bailleur pourrait ainsi n’autoriser la sous-location qu’en contrepartie de la perception d’une partie des sous-loyers.

Cette solution pourrait ménager les intérêts du bailleur et du preneur et ne pas avoir pour effet de limiter la location touristique.

Pour tous renseignements en matière immobilièré, contactez :

Pascal MARTIN-MENARD
Avocat associé
pmartin@emo-avocats.com