L’aménagement de peine ab initio : une pratique méconnue ?

L’aménagement de peine ab initio : une pratique méconnue ?

Lorsqu’un tribunal correctionnel prononce une peine égale ou inférieure à deux ans d'emprisonnement, ou, pour une personne en état de récidive légale, une peine égale ou inférieure à un an, les juges peuvent décider que cette peine sera exécutée en tout ou partie sous le régime de la semi-liberté.

Ce système a été introduit dans le Code pénal depuis longtemps, mais assez peu utilisé.

Cette possibilité d’aménagement ab initio est prévue par les articles 132-25 et 132-26-1 du Code pénal. Il s’agit là d’une vraie alternative à l’enfermement. Cette faculté est particulièrement intéressante en cas de comparution immédiate pour le détenu qui comparait devant le tribunal au sortit d’une garde à vue.

Cependant, ces aménagements de peine ab initio ne peuvent être prononcés sans que la juridiction ne dispose de pièces nécessaires pour apprécier l’opportunité et la possibilité de prononcer ce type d’alternative.

Ces pièces dépendent bien sûr de la nature de l’aménagement envisagé par les juges ou proposé par la défense.

Rappelons que l’intéressé doit justifier :

1° Soit de l'exercice d'une activité professionnelle, même temporaire, du suivi d'un stage ou de son assiduité à un enseignement, à une formation professionnelle ou à la recherche d'un emploi ;
2° Soit de sa participation essentielle à la vie de sa famille ;
3° Soit de la nécessité de suivre un traitement médical ;
4° Soit de l'existence d'efforts sérieux de réadaptation sociale résultant de son implication durable dans tout autre projet caractérisé d'insertion ou de réinsertion de nature à prévenir les risques de récidive.

Pour un placement sous surveillance électronique, il conviendra de produire l’accord de la personne qui héberge(reait) le ou la condamné(e), la copie de sa pièce d’identité et un justificatif de domicile.

De même, les pièces de nature professionnelle sont indispensables (promesse d’embauche, contrat de travail précisant les horaires, soins en cours, livret de famille, etc…).

Bien sûr, cela suppose que la juridiction de jugement soit en mesure de décider, le jour où elle se prononce sur la culpabilité et donc sur la peine, cet aménagement de peine, c’est-à-dire qu’elle dispose des justificatifs propres pour dire que la peine sera exécutée en tout ou partie sous le régime de la semi-liberté ou avec un bracelet électronique.

Il est donc important de disposer d’un dossier le plus complet possible.

En comparution immédiate, les magistrats n’ont le plus souvent qu’une adresse (lorsqu’elle existe), et un emploi rarement vraiment vérifié. Or, pour prononcer une semi-liberté, par exemple, il faut connaître le lieu et les horaires de travail, le mode de transport, les temps de trajet…

Pour un bracelet électronique, c’est encore plus compliqué, puisqu’il faut que la personne soit propriétaire ou titulaire du bail, ou bien l’accord du maître des lieux. Dans tous les cas, obtenir dans la journée l’adhésion et l’implication d’un conjoint, ou des parents d’un jeune délinquant majeur n’est pas chose aisée.

Parfois, les magistrats ne sont pas opposés à ce que des pièces puissent être déposées en urgence au greffe de l’application des peines après le prononcé du jugement correctionnel statuant sur la peine, par exemple dans les cas où le dossier permettrait de considérer l’aménagement ab initio opportun et réaliste mais au cas où il manquerait quelques pièces pour pouvoir être prononcé tout de suite.

En pratique, les condamnés seront convoqués dans un bref délai (48h00) au SPIP pour se voire remettre une convocation en vue d’un entretien avec un conseiller d’insertion et de probation qui se prononcera non sur l’opportunité de l’aménagement, mais sur sa faisabilité notamment technique (en cas de port d’un bracelet).

Le Juge de l’application des peines pourra toujours proposer de substituer un autre aménagement en fonction des pièces justificatives alors fournies.

Il a alors 5 jours pour statuer.

De tous sens, ce dispositif assez méconnu mais qui tend pourtant à éviter l’incarcération doit être préparé en amont.

D’où la nécessité de préparer une audience correctionnelle, même de comparution immédiate, le plus efficacement possible avec l'aide de ses proches, le cas échéant.

Pour tous renseignements, contactez :

Arnaud de SAINT REMY
Avocat Associé – Ancien Bâtonnier de l’Ordre des avocats
Ancien président de la Conférence Régionale des Bâtonniers de Normandie
Membre du Conseil de l’Ordre des avocats au barreau de Rouen
https://www.linkedin.com/in/arnaud-de-saint-remy-a65582122/

ARTICLE 132-25 DUI CODE PÉNAL