Jurisprudence : La mention faite par le médecin traitant de « burn-out » sur un arrêt de travail ne justifie pas une faute déontologique de sa part

Jurisprudence : La mention faite par le médecin traitant de « burn-out » sur un arrêt de travail ne justifie pas une faute déontologique de sa part

Le constat de l’existence d’un syndrome d’épuisement professionnel (burn-out) sans disposer de l’analyse des conditions de travail du salarié ne saurait caractériser l’établissement d’un certificat tendancieux ou de complaisance.

Quels sont les faits ?

Une médecin traitant délivre à l’une de ses patientes, salariée d’une entreprise, un avis de prolongation d’arrêt de travail dont le volet destiné au médecin-conseil de l'assurance maladie portait, dans la rubrique « éléments d'ordre médical » la mention « burn-out ».

L’employeur de la salariée porte plainte devant les instances disciplinaires de l’ordre des médecins, car la médecin aurait méconnu son obligation de déontologie, fixée par l’article R.4127-8 du Code de la santé publique, en établissant ce document.

Quelles sont les règles ?

L’article L.162-4-1 du Code de la Sécurité sociale dispose que les médecins sont tenus de mentionner sur la prescription d’arrêt de travail destinée au service de contrôle médical, dont la transmission conditionne le versement des indemnités journalières au salarié, « les éléments d’ordre médical justifiant l’interruption de travail ». 

L’article R.4127-28 du Code de la santé publique, invoqué par l’employeur, dispose quant à lui que : « La délivrance d'un rapport tendancieux ou d'un certificat de complaisance est interdite ». 

En suivant ces principes, la chambre disciplinaire nationale de l’ordre des médecins a déduit que la médecin avait méconnu son obligation de déontologie.

En effet, la médecin ne pouvait se fonder sur les seules déclarations de la salariée, qui indiquait que son stress et son angoisse trouvaient leur origine dans son activité professionnelle, sans disposer de l’analyse des conditions de travail de la salariée, prérogative du médecin du travail.

Quel est l’apport de l’arrêt du 28 mai 2024 ?

Le Conseil d’État censure l’avertissement infligé par la chambre disciplinaire de première instance et la chambre nationale de l’ordre des médecins à la médecin.

En effet, le constat du médecin de l’existence d’un burn-out, sans disposer de l’analyse des conditions de travail de la salariée, ne saurait caractériser l’établissement d’un certificat tendancieux ou de complaisance. 

Cette décision risque d’entrainer un vif débat, d’autant plus que le burn-out est un sujet d’actualité.

En effet, nous avons tendance, de manière inconsciente, à assimiler un « burn-out » avec la responsabilité de l’employeur. Or, un tel syndrome n’est pas forcément consécutif d’un comportement fautif de l’employeur.

Aussi, les médecins traitants risquent d’être de plus en plus confrontés à cette situation « compte tenu de l’importance prise par les phénomènes de burn-out dans un contexte d’intensification du travail et de dégradation massive du rapport au travail mises en évidence par de nombreuses études » (Conclusion de Monsieur Raphaël Chambon, Rapporteur public).

Source : Conseil d’État, 28 mai 2024, n°469089

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L’équipe du Pôle Social dirigé par Emmanuelle DUGUE-CHAUVIN se tient bien entendu à votre disposition pour répondre à vos questions et vous accompagner sur ce sujet, de concert avec son associé Maitre Alexandre Noblet Conseil des professionnels et établissements de santé. 

Emmanuelle DUGUE-CHAUVIN
Avocat associé spécialiste en droit social
En charge du Pôle social et du Pôle Santé-Sécurité au travail au sein du cabinet EMO AVOCATS
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Marine DAMOY
Juriste en droit social
Pôle social du cabinet EMO AVOCATS
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