Heures supplémentaires : quelle est l’étendue de la preuve incombant aux salariés ?

Heures supplémentaires : quelle est l’étendue de la preuve incombant aux salariés ?

Pour rappel, en application de l’article L.3171-4 du Code du travail, la preuve des heures de travail réalisées n’incombe spécialement à aucune des deux parties.

Toutefois, au fil des décisions rendues en la matière, nous avons pu constater que certains aménagements ont été apportés à ce mécanisme de preuve partagée, allant jusqu’à une diminution de l’intensité de la charge de la preuve incombant aux salariés.

En particulier, la chambre sociale de la Cour de cassation a précisé, dans un arrêt rendu le 18 mars 2020, qu’il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

Dans un arrêt rendu récemment le 27 janvier 2021, la Cour de cassation apporte une précision sur cette notion d’éléments suffisamment précis devant être produits par les salariés dans un tel contentieux.

Quels étaient les faits de l’espèce ?

Un salarié présente une demande de rappel d’heures supplémentaires en produisant un décompte détaillé des heures de travail précisant : les heures de prise et de fin de service, les rendez-vous professionnels, le nombre d’heures quotidien et le total hebdomadaire.

La société, ignorant le nombre d’heures accomplies par le salarié et ne les contrôlant pas, n’avait fourni aucun élément en réponse à ceux produits par le salarié.

Le salarié a été débouté par la Cour d’appel qui a retenu qu’il ne mentionnait pas ses heures de travail sur les comptes-rendus hebdomadaires transmis à l’employeur, que les fiches de frais ne permettaient pas de déterminer les horaires réellement accomplis par le salarié et que les décomptes produits étaient insuffisamment précis en ce qu’ils n’indiquaient pas la prise éventuelle d’une pause méridienne.

Que dit l’arrêt rendu par la Cour de cassation ?

La précision attendue du salarié est limitée.

Le fait que le décompte des heures de début et de fin de service ne fasse pas apparaître le temps consacré à une éventuelle pause méridienne ne permet pas au juge de rejeter la demande du salarié. Il n’est donc pas attendu du salarié qu’il détaille ses heures de pauses méridiennes.

A défaut, cela conduit à faire peser la charge de la preuve sur les salariés.

A cela vient s’ajouter le fait que la preuve de la prise des temps de pause incombe à l’employeur qui doit donc être en mesure d’apporter ses propres éléments de contrôle sur ce point, comme le précise comme le rappelle la chambre sociale dans sa note explicative.

Quelles conséquences pour les employeurs ?

Par cette nouvelle décision, il convient de constater que la charge de la preuve des salariés en matière d’heures supplémentaires n’est en aucun cas de la même nature, ni de la même intensité que celle qui pèse sur l’employeur dans le cadre de son obligation de contrôle de la durée du travail

En conséquence, les employeurs doivent impérativement contrôler la durée du travail de leurs salariés, faute de quoi ils ne pourront fournir aucun élément en réponse à ceux communiqués par les salariés en cas de litige et seront ainsi condamnés.

Contactez-nous

L’équipe du Pôle Social dirigée par Emmanuelle DUGUE-CHAUVIN se tient bien entendu à votre disposition pour répondre à vos questions relatives à cette problématique des heures supplémentaires.

Emmanuelle DUGUE-CHAUVIN
Avocat associé spécialiste en droit social
En charge du Pôle social et du Pôle Santé-Sécurité au travail au sein du cabinet EMO AVOCATS
echauvin@emo-avocats.com

Camille LAMBERT
Juriste
Pôle social du cabinet EMO AVOCATS
clambert@emo-avocats.com