Inaptitude : les limites aux pouvoirs du médecin du travail

Inaptitude : les limites aux pouvoirs du médecin du travail

La recherche d'un lien, au moins partiel, entre l'inaptitude et l'accident du travail ne relève pas de la mission du médecin du travail ni par voie de conséquence des pouvoirs du médecin inspecteur du travail le cas échéant saisi en application de l'article L 4624-7 aux fins d'éclairer la juridiction sur les questions de fait relevant de sa compétence.

Le médecin du travail n'est pas non plus compétent pour reconnaitre le caractère professionnel d'une maladie ou d'un accident.

Les avis, propositions écrites, indications ou conclusions émises par le médecin du travail peuvent être contestés devant le Conseil de prud’hommes statuant en référé, dans les 15 jours suivant leur notification, par le salarié ou l’employeur. 

Le Conseil de prud’hommes pourra alors décider de recourir ou non aux compétences du médecin inspecteur du travail en lui confiant « toute mesure d’instruction lui permettant de l’éclairer sur les questions de fait relevant de sa compétence ». Il pourra également désigner un expert, mais de manière facultative.   

Cependant, les juridictions peuvent tout à fait refuser de recourir à une telle expertise. 

C’est ce qui a été décidé dans deux arrêts de Cour d’appel.

 Arrêt du 28 mai 2020 de la Cour d’appel de Paris

Un salarié avait été déclaré inapte après une visite de reprise. Il a saisi en référé le Conseil de prud’hommes : il contestait l’absence, dans l’avis, de toute mention sur l’origine au moins partiellement professionnelle de l’inaptitude.

Les juridictions ont considéré que la recherche d'un lien, au moins partiel, entre l'inaptitude et l'accident du travail ne relève pas de la mission du médecin du travail ni par voie de conséquence des pouvoirs du médecin inspecteur du travail le cas échéant saisi en application de l'article L 4624-7 aux fins d'éclairer la juridiction sur les questions de fait relevant de sa compétence.

 

 Arrêt du 30 novembre 2018 de la Cour d’appel de Douai

Un salarié avait également été déclaré inapte, et soutenait devant les juridictions que lorsque le médecin du travail indiquait dans son avis que « tout maintien du salarié serait préjudiciable à sa santé », cela induirait nécessairement que l'inaptitude serait d'origine professionnelle. Pour la Cour d’appel, ce raisonnement est faux.

La Cour d’appel rappelle que le médecin du travail n'est pas compétent pour reconnaitre le caractère professionnel d'une maladie ou d'un accident.

Cette reconnaissance relève en effet de la compétence de la caisse primaire d'assurance maladie, de la juridiction de sécurité sociale et le cas échéant, de la juridiction prud'homale dans le cadre de la contestation du licenciement.

 Conclusion

Ce n’est donc pas à la médecine du travail de déclarer si l’inaptitude a une origine professionnelle ou non, ou encore de reconnaitre le caractère professionnel d’une maladie ou d’un accident.

Les pouvoirs de la médecine du travail sont donc limités aux seuls éléments de nature médicale.

Un des intérêts de cette procédure de contestation apparait lorsque le médecin émet un avis d’aptitude avec de telles réserves qu’il équivaut à un avis d’inaptitude. Cette remise en question de l’avis du médecin se déroulera au regard des seuls éléments médicaux du dossier, et non au regard de l’origine professionnelle ou non de l’accident ou de la maladie.

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Emmanuelle DUGUE-CHAUVIN
Avocat associé spécialiste en droit social
En charge du Pôle social et du Pôle Santé-Sécurité au travail au sein du cabinet EMO AVOCATS
echauvin@emo-avocats.com

Clémence MOREAU
Avocate
Pôle social du cabinet EMO AVOCATS
cmoreau@emo-avocats.com


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